Le Carey Price d'antan... avec le Canadien d'antan devant lui

CALGARY, AB - NOVEMBER 15: Johnny Gaudreau #13 of the Calgary Flames takes a shot on the net of Carey Price #31 of the Montreal Canadiens during an NHL game at Scotiabank Saddledome on November 15, 2018 in Calgary, Alberta, Canada. (Photo by Derek Leung/Getty Images)
By Marc Antoine Godin
Nov 16, 2018

CALGARY – Il y a des entraîneurs dont l’humeur ne dépend que du résultat final. Si l’équipe gagne ils défendent leur bilan; si l’équipe perd, bien souvent le verre sera à moitié vide.

Claude Julien n’est pas de ceux-là. Ses hommes ont eu beau trouver le moyen de couronner une remontée et de vaincre les Flames de Calgary grâce à un cadeau de Mike Smith, il n’allait pas pavaner. Car jouer une seule bonne période sur trois n’est pas une fondation solide pour avoir du succès.

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« On peut nommer tous les joueurs qui ont eu des difficultés dans les deux premières périodes et tous les joueurs qui ont été meilleurs en troisième », a-t-il fait remarquer après la rencontre.

« Au fin fond de nous-mêmes, tout le monde était un peu embarrassé par le dernier match et on voulait gagner celui-ci, a dit Julien. Mais en même temps, c’est peut-être pour ça qu’on était hésitants. On jouait pour ne pas perdre, on ne jouait pas pour gagner. Espérons qu’on va retrouver un peu de notre oumpf et comprendre que lorsqu’on joue comme on l’a fait en troisième, on se donne de bien meilleures chances de gagner que de la manière dont s’y est pris dans les deux premiers vingts. »

Du hockey rope-a-dope, une équipe dominée aux chances de marquer mais qui trouve le moyen de prendre les devants, une équipe qui s’accroche à son avance dans les dernières minutes; ça ressemblait à une victoire du Canadien du bon vieux temps.

Mais une victoire du bon vieux temps implique aussi que Carey Price sorte les marrons du feu pour aider son équipe à l’emporter. Et quel soulagement ce fut de le voir revêtir son ancien costume.

Price sait que son rôle avec le Canadien inclut de sortir ses coéquipiers du pétrin certains soirs. De voler des matchs. Ça fait partie de son contrat même si la clause est implicite. Et c’est en plein ce qu’il a fait en repoussant 43 lancers. Relever certains déplacements plus hasardeux serait de jeter inutilement un voile négatif sur un joueur qui, aux prises avec un problème de confiance, n’aurait pu faire mieux pour se remettre sur la bonne voie.

Price et ses coéquipiers ont une relation symbiotique, un peu comme l’hippopotame et le pique-boeuf qui trouvent chacun leur compte à vivre ensemble (j’ignorais tout ça avant d’avoir un jeune enfant qui écoute Diego). Dans la fable, Price est l’hippopotame – la présence imposante et intimidante – et le reste de l’équipe est comme l’oiseau qui picore juste assez de buts pour soulager le gros animal. Traditionnellement, en tout cas, c’est comme ça que les choses ont fonctionné à Montréal… avec un succès relatif.

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Ce n’était pas nécessairement réconfortant de voir le Tricolore retourner à sa doudou d’autrefois, mais ce l’était de voir Price de nouveau capable de remplir le rôle. Il n’avait pas cédé sa place à son auxiliaire durant deux matchs successifs depuis belle lurette et il entendait revenir devant son filet en ayant une attitude qui équivaut à dire à l’adversaire « venez et essayez de me battre ». Son objectif était de se montrer plus défiant et c’est ce qu’il a été en mesure d’accomplir face aux Flames, même s’il n’y pouvait rien sur le premier but de Matthew Tkachuk et qu’il a cédé une seconde fois devant celui-ci au terme d’une séquence où le trio de Max Domi, complètement embouteillé, est demeuré statique.

Ce trio-là peut-être été le premier bénéficiaire du rendement de Price dans ce match. N’eut été du gardien, l’évaluation de leur travail n’aurait peut-être pas été la même.

Jonathan Drouin a certes nivelé les chances en complétant le travail au terme de ses potes autour du pauvre Mike Smith, mais ce but-là venait mettre un baume sur des difficultés qui reflétaient bien celles de l’équipe au cours des 40 premières minutes.

À forces égales, leur trio avait concédé au moins un tir aux Flames dans 12 de leurs 13 présences lors des deux premières périodes. Les dommages ont été limités, mais ce n’est pas la première fois que des joueurs qui, en principe, devraient passer plus de temps en zone adverse ne sortent pas gagnants de leurs échanges. Si l’on isole le travail de Drouin au cours des trois derniers matchs, on remarque que le Canadien a tenté 41 tirs quand il était sur la glace alors que l’adversaire en a tenté 68. Et au chapitre des chances de marquer de catégorie A – du moins celles compilées par Natural Stat Trick – les trois équipes adverses ont eu le dessus 18-8. Ce qui sauve ce trio, c’est son opportunisme. C’est la raison pour laquelle il serait gênant de pointer Domi du doigt compte tenu de tout ce qu’il a livré depuis le début de la saison.

Mais dans cette éternelle dispute entre le processus et le résultat, si le résultat est comme un bonbon, comme une gratification immédiate, la façon de faire demeure le barème par lequel on peut espérer du succès à long terme.

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Drouin s’est objecté à l’idée que son trio avait connu certaines difficultés face aux Flames. C’est vrai qu’en début de match, il a brillé sur une belle pièce de jeu où il a fait preuve de patience, traversant l’enclave en attendant de se donner l’angle de tir qu’il voulait. Et qu’en tout début de troisième, avec Phillip Danault et Brendan Gallagher encore sur la glace, il a obtenu une autre belle chance de marquer. Ajoutez à cela son but égalisateur et on peut le comprendre de plaider ainsi sa cause. En même temps, son coach n’est pas dupe; si ça avait été satisfaisant, il ne serait pas présenté devant les journalistes en ayant « Merci Carey » écrit dans le front.

Les dégagements refusés indiquent parfois l’allure d’une rencontre parce qu’ils finissent par témoigner des fois où une équipe sentait la soupe chaude dans son territoire. À Calgary, le Canadien a eu 12 dégagements refusés contre seulement un pour les Flames. Collectivement, ce serait mieux d’avoir le triomphe modeste.

La trame narrative en début de saison était de dire que la bonne tenue du Tricolore allait donner le temps à Price de retrouver ses repères. Face aux Flames, c’est l’inverse qui s’est produit.

À chacun d’en prendre acte.

(Photo: Derek Leung / Getty Images)

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