La flexibilité salariale du Canadien et les possibilités qu’elle offre pour l’entre-saison

MONTREAL, CANADA - NOVEMBER 12:  Cole Caufield #22 of the Montreal Canadiens celebrates his goal with teammates on the bench during the third period of the game against the Pittsburgh Penguins at Centre Bell on November 12, 2022 in Montreal, Quebec, Canada.  The Montreal Canadiens defeated the Pittsburgh Penguins 5-4 in overtime.  (Photo by Minas Panagiotakis/Getty Images)
By Marc Antoine Godin et Arpon Basu
Apr 22, 2023

Quand on pense à l’entre-saison qui s’amorce chez le Canadien, il vaut la peine de jeter un coup d’œil au passé.

L’historique de travail du directeur général Kent Hughes sous les ordres de Jeff Gorton est limité, mais il nous est possible de glaner de l’information à partir de leurs actions et de leurs paroles.

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Hughes a déclaré lors de sa conférence de presse de fin de saison que le Canadien ne devrait pas commencer la prochaine saison en pensant qu’il est déjà éliminé des séries éliminatoires, ce qui constitue une étape importante dans l’établissement d’une nouvelle culture d’imputabilité. Le Tricolore a souvent perdu cette saison et ça n’a fait sourciller personne. Les partisans sont restés solidaires et les critiques des médias ont été minimes, si bien qu’on ne blâmerait pas les joueurs et les entraîneurs de s’être demandé pourquoi Montréal a toujours eu la réputation d’être un marché si difficile.

Or, le DG a dit souhaiter que le noyau de jeunes joueurs à Montréal s’approprie le succès de l’équipe, et établir des attentes plus élevées envers eux est une façon d’assurer cette appropriation. L’amélioration qu’espère Hughes viendra en grande partie des progrès de ce jeune noyau, un progrès qui devrait s’effectuer de façon organique à mesure que Nick Suzuki, Cole Caufield, Kirby Dach, Kaiden Guhle, Juraj Slafkovský et quelques autres continueront à se développer.

Hughes n’a pas dit grand-chose durant son bilan qui nous donne un signal clair de ce qui s’en vient pendant l’entre-saison, mais il a néanmoins fourni quelques indices. Tout d’abord, malgré ce qu’il a dit au sujet des attentes changeantes et de la volonté du Canadien de passer à un mode plus compétitif, il ne cherchera pas de solutions alambiquées et ne posera pas de gestes visant uniquement à être compétitif à court terme.

« Si on peut faire quelque chose pour nous aider l’année prochaine, mais seulement l’année prochaine, ce n’est pas dans les cartons », a-t-il prévenu.

Hughes a également parlé de flexibilité sous le plafond salarial. Dans le contexte actuel, c’est un atout précieux dont il faut prendre soin. Mais sa première réponse a été de rappeler que l’été dernier, dès que le Canadien a trouvé une certaine marge de manoeuvre en plaçant le nom de Carey Price sur la liste des blessés à long terme, il a utilisé ce nouvel espace pour acquérir Sean Monahan ainsi qu’un choix de première ronde des Flames de Calgary. D’après ce qu’on comprend, Hughes voudra utiliser cette flexibilité salariale comme une arme encore cet été.

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« Je m’attends à ce que, dans la mesure du possible, on essaie d’utiliser notre flexibilité sous le plafond à notre avantage, à condition que ça ne nous lie pas les mains à long terme, a-t-il déclaré. Si on peut améliorer l’équipe en ajoutant un joueur ou en prenant un contrat, on est prêts à faire tout ce qui peut contribuer à réaliser nos objectifs. »

Afin d’examiner ce à quoi on peut s’attendre du Canadien durant la saison morte, examinons d’abord cet espace sous le plafond salarial, puis regardons les choses qui ont fonctionné pour Hughes l’an dernier et qu’il pourrait être tenté de répéter cette année.

Le plafond salarial

Dans l’état actuel des choses, en tenant pour acquis que Monahan, Jonathan Drouin et Paul Byron ne seront pas de retour, le Canadien a 23 joueurs sous contrat en vue de la saison prochaine pour une masse salariale d’un peu moins de 74 millions $, ce qui laisse un peu plus de 9,5 millions $ à sa disposition. Ce montant comprend le salaire de 10,5 millions $ de Carey Price, qui risque de se retrouver une fois de plus sur la liste des blessés à long terme. Cela donne donc au Canadien environ 20 millions $ d’espace utilisable avant qu’il ne se soit entendu avec des joueurs tels que Cole Caufield, Michael Pezzetta, Rafaël Harvey-Pinard et Jesse Ylönen. Nous y reviendrons dans un instant.

Même si l’on ne tient pas compte de l’argent consacré aux nouveaux contrats de la maison, il s’agit là d’une somme considérable et, comme Hughes l’a suggéré la semaine dernière, le Canadien a l’intention de l’utiliser pour trouver tout avantage compétitif possible. Et il y a des façons pour lui d’accroître encore davantage cette flexibilité.

À la fin de la saison, on a demandé à Hughes s’il avait l’intention de procéder à des rachats de joueurs et il n’a pas voulu répondre, disant qu’il n’en était pas encore là dans son processus. Mais la réalité est qu’il y a un an, aux prises avec un budget aussi serré, l’option d’un rachat n’était pas envisageable pour le Canadien. Aujourd’hui, si Hughes veut faire de la place dans sa formation pour un joueur plus jeune tout en créant de l’espace sous le plafond – même si cela lui coûte de l’espace dans un an – il a la flexibilité pour le faire.

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Mike Hoffman entre dans la dernière année de son contrat, et le faire jouer régulièrement semble aller à l’encontre du pas que le Canadien souhaite franchir, qui est de s’approcher de la compétitivité et de faire en sorte que le jeune noyau s’approprie l’équipe. Il n’y a que quatre postes d’ailiers disponibles sur le top-6, et deux d’entre eux sont déjà occupés par Caufield et Josh Anderson. Donner l’une des deux places restantes à Hoffman alors qu’il est en fin de contrat n’a pas beaucoup de sens, pas plus que de l’affecter à un rôle sur un troisième ou un quatrième trio.

Si le Canadien voulait racheter le contrat de Hoffman – ce qui est loin d’être acquis – il économiserait 3,33 millions $ sous le plafond salarial la saison prochaine (comparé au salaire moyen de Hoffman de 4,5 millions $) et il lui en coûterait 1,67 million $ sous le plafond durant la saison 2024-25. Le Canadien pourrait aussi choisir de laisser Hoffman terminer son contrat, et ainsi le sortir des livres en 2024-25, mais cela signifierait que Hoffman jouerait des minutes significatives au détriment d’un joueur plus jeune ayant un avenir avec l’équipe, dont peut-être celui que le CH repêchera quelque part dans le top-7 à la fin du mois de juin.

Il y a par ailleurs de mauvaises nouvelles en ce qui concerne le plafond salarial du Canadien. Étant donné qu’il a travaillé à l’intérieur des cadres de la liste des blessés à long terme toute l’année, il était acquis que les bonis de performance gagnés par les joueurs écoulant leur contrat d’entrée allaient être considérées comme des excédents, ce qui signifie que ce montant sera déduit de son plafond la saison prochaine. Les blessures de Caufield, Guhle et Slafkovský ont limité les dégâts, mais selon PuckPedia, l’excédent de bonis du Canadien pour la saison prochaine sera de 1,17 million $. Autrement dit, la hausse anticipée de 1 million $ du plafond salarial prévue pour la saison prochaine n’aura pas vraiment d’impact positif sur le Canadien.

(Minas Panagiotakis/Getty Images)

Les nouveaux contrats

Le prochain contrat de Caufield est une étape cruciale pour tout ce qui va se passer pendant l’entre-saison. Comme nous l’avons démontré, le Canadien dispose d’une grande marge de manœuvre cette saison, mais le problème de construire autour d’un jeune noyau dans la LNH d’aujourd’hui, c’est que ces jeunes joueurs sont payés plus tôt et plus cher lors de leur deuxième contrat qu’ils ne l’étaient par le passé.

Nick Suzuki en est un parfait exemple, et il y en a plusieurs autres dans la LNH. La situation ne sera donc pas différente pour les autres jeunes joueurs du noyau du Canadien. Si Guhle continue d’afficher la croissance qu’il a démontrée au cours de la première moitié de la saison et si Slafkovský fait un bond en avant aussi important que le Canadien l’espère, ils seront à deux ans de passer à la caisse. Arber Xhekaj, Samuel Montembeault et Justin Barron ne deviendront peut-être pas aussi riches, mais ils auront néanmoins besoin d’un contrat l’été prochain. Tout cela s’additionne, et même avec un plafond salarial qui devrait augmenter de manière significative l’été prochain, il faut gérer tout cela.

Il serait tentant de regarder le contrat qu’a signé avec les Stars de Dallas l’attaquant Jason Robertson, qui est représenté par la même agence que Caufield, et de croire que cela pourrait être alléchant pour Caufield. Le contrat de Robertson est assorti d’une offre qualificative de 9,3 millions $ à la fin et qui l’amène à un an de l’autonomie complète tout en lui procurant un salaire moyen de 7,75 millions $ pendant quatre ans. Cela dit, Caufield a exprimé à plusieurs reprises son désir d’être à Montréal à long terme, le Canadien est intéressé à le garder à Montréal à long terme, et les membres du camp Caufield nous ont assuré que sa situation n’avait rien à voir avec celle de Robertson et qu’elle n’était pas comparable.

Si Caufield veut signer pour sept ans, les balises sont là. Issus de la même année de repêchage que lui, Dylan Cozens (7e au total en 2019) a signé une entente de sept ans à 7,1 millions $ par année avec les Sabres de Buffalo, alors que Matthew Boldy (12e au total) a signé avec le Wild du Minnesota pour sept ans et 7 millions $ par année. On peut dire qu’il s’agit là du plancher en termes de négociation. Le plafond est représenté par le tout premier choix de l’encan 2019, Jack Hughes – également client de Pat Brisson – qui a signé avec les Devils du New Jersey pour huit ans et 8 millions $ par année au milieu de sa deuxième saison, une entente qui semble déjà être une aubaine.

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Caufield devrait trouver son affaire quelque part entre 7 et 8 millions $. En supposant qu’il recevra un salaire moyen de 7,5 millions $, cela laisse encore au Tricolore une marge de manœuvre allant de 11 millions $ (sans rachat de Hoffman) à 14 millions $ (avec rachat de Hoffman).

Denis Gurianov doit recevoir une offre qualificative de 2,9 millions $ et, pour un certain nombre de raisons, nous doutons qu’il en recevra une de la part du CH, ce qui ferait de lui un joueur autonome sans compensation. Et les nouveaux contrats d’Ylönen, Harvey-Pinard, Pezzetta et Alex Belzile ne devraient pas provoquer de grands soubresauts, à moins que le Canadien ne décide d’opter pour un contrat à long terme avec l’un ou plusieurs d’entre eux.

Non, le soubresaut viendrait de ce qui pourrait être la grande transaction de l’été à Montréal.

(John Leyba/USA Today)

Le dossier Pierre-Luc Dubois

Il y a une idée qui circule selon laquelle l’émergence de Dach rend l’acquisition de Dubois moins importante pour le Canadien, et il y a peut-être une part de vérité là-dedans. Mais lorsque vous avez l’occasion d’ajouter un joueur du calibre de Dubois – en laissant de côté pour l’instant son origine et la langue qu’il parle – et que vous cherchez à accélérer une reconstruction de toutes les façons possibles, il serait stupide de ne pas y jeter un coup d’œil. Et même de regarder cela de très près.

Dubois est apparemment disponible depuis que les Jets de Winnipeg savent qu’il n’a pas l’intention de signer un contrat à long terme avec eux et depuis que son agent (Brisson) a déclaré au monde entier, lors du repêchage de l’an dernier, que son client aimerait jouer à Montréal. Les Jets arrivent à la croisée des chemins car leur gardien digne du trophée Vézina, leur (ancien) capitaine ainsi que leur meilleur joueur en attaque sont tous en voie de devenir autonomes sans compensation en 2024.

Lorsqu’un joueur de la trempe de Dubois est disponible dans de telles circonstances, il ne faut pas se poser trop de questions, comme qui jouera au centre ou à l’aile, ou qui irait mieux sur quel trio. Vous ajoutez le talent d’abord et vous répondez à ces questions-là plus tard.

Il y a deux types de coûts associés à l’acquisition de Dubois, et les deux ont des précédents avec lesquels travailler.

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Le premier est le prix à payer dans un échange. Lorsque les Jets se sont retrouvés dans une situation très similaire avec Jacob Trouba – le défenseur était à un an de l’autonomie complète, il ne voulait pas signer à long terme et il avait une destination spécifique en tête – le DG des Jets Kevin Cheveldayoff a fourni un modèle de ce à quoi un échange de Dubois pourrait ressembler. On rappellera que la personne à l’autre bout de la ligne dans l’échange de Trouba était … Jeff Gorton.

Cheveldayoff a réussi à obtenir des Rangers Neal Pionk, qui a essentiellement agi comme remplaçant de Trouba dans la formation des Jets, ainsi que le 20e choix du repêchage de 2019. Le Canadien, lui, détient le choix de première ronde des Panthers de la Floride, qui sera probablement le 17e, mais il n’a pas vraiment de remplaçant de Dubois à offrir aux Jets, du moins pas à court terme.

Mais les circonstances des Jets sont également différentes maintenant de l’époque où ils ont ont échangé Trouba. Une ère de bouleversements s’en vient pour eux, et peut-être préféreraient-ils ajouter un espoir qu’un joueur établi, ou peut-être même deux étant donné que des espoirs ne sont pas des joueurs éprouvés comme l’était déjà Pionk. Le Canadien en a une tonne dans sa besace. Dans tous les cas, il ne nous semble pas que le CH aurait besoin d’ajouter un Josh Anderson pour que cette transaction fonctionne. Les Jets n’auraient peut-être pas intérêt à acquérir Anderson non plus s’ils jugent que leur fenêtre de compétitivité se déplace prochainement. Et c’est sans compter le fait qu’Anderson détient une clause de non-échange valide auprès de huit équipes; il faudrait donc que la transaction ait du sens pour lui aussi.

Le second coût est celui du contrat qu’il faudrait ensuite faire signer à Dubois. Comme nous l’avons déjà établi, le Canadien a un peu d’argent pour travailler cet été, mais cela ne durera pas éternellement. Et les 11 à 14 millions $ dont nous avons parlé plus tôt ? Une bonne partie de cette somme serait nécessaire pour signer un contrat à long terme avec Dubois.

Deux signatures récentes semblent les plus pertinentes à cet égard : Mathew Barzal s’est entendu avec les Islanders de New York pour huit ans à raison de 9,15 millions $ par année tandis que Roope Hintz a signé avec les Stars pour huit saisons à 8,45 millions $. Ils ont tous deux signé leur contrat à un an de l’autonomie complète et, à l’instar de Dubois, ils avaient droit à l’arbitrage en tant que joueurs autonomes avec compensation.

Barzal avait 25 ans lorsqu’il a signé et Hintz venait d’avoir 26 ans. Dubois, lui, fêtera ses 25 ans le jour de la Fête nationale. Classique.

Les statistiques de ces trois joueurs au moment de la signature de leur contrat ne sont pas identiques, mais quand même assez proches (les statistiques de Barzal et Hintz n’incluent pas cette saison).

JoueurPJBAPtsPTS/PJ
434
129
173
302
0,70
239
80
90
170
0,71
362
91
220
311
0,86

Dubois apporte évidemment plus que des points. C’est un joueur de centre grand format, puissant et robuste, qui semble s’épanouir dans un environnement de séries éliminatoires. Mais ces deux contrats semblent au moins fournir un cadre pour ce que Dubois pourrait obtenir dans sa prochaine entente, et l’évaluer à 9 millions $ par année semble relativement sûr.

(David Kirouac/USA Today)

L’avenir de Joel Edmundson

L’objectif fondamental de Hughes est de faire du Canadien une équipe capable de connaître un succès durable et, pour y arriver, il s’agit de maximiser le développement des jeunes joueurs et tenter d’ajouter du talent dans une palette d’âge bien précise. À moins que les plans aient récemment changé, l’organisation s’estime encore en mode d’acquisition d’actifs afin de soutenir le « durable » dans « succès durable », et un nombre limité de vétérans peuvent aider le Canadien à ce niveau-là.

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Ce qui nous amène à Joel Edmundson.

« Comme j’ai expliqué à Joel quand on s’est rencontrés, s’il y avait un échange qui avancerait nos objectifs, c’était possible qu’on fasse l’échange, a commenté Hughes le jour de la date limite des transactions. Sinon, Joel est un joueur qui nous amène du leadership, qui est très bon avec nos jeunes joueurs et qui est bon pour notre équipe. »

Edmundson nous a avoué lors des entrevues de fin de saison que la possibilité qu’il soit échangé cet été demeurait encore très présente dans son esprit, même s’il souhaitait rester avec le Canadien.

Évidemment, le CH pourrait très bien décider de le garder dans le giron de l’équipe jusqu’à la date limite des transactions, et si le CH n’est pas en position de participer aux séries, de l’échanger au plus offrant à ce moment-là. Toutefois, deux raisons nous portent à croire que ce ne serait pas l’idéal.

Tout d’abord, ses maux de dos chroniques ôtent toute assurance que le vétéran défenseur sera en santé à la date limite des transactions. Il serait regrettable que le Canadien, pour une deuxième année de suite, soit incapable d’aller chercher de la valeur pour ses services.

De plus, la congestion du côté gauche, où se trouvent aussi Guhle, Xhekaj, Mike Matheson et Jordan Harris, suggère que de garder Edmundson se ferait au détriment du développement d’un jeune défenseur. Car si l’équipe décidait d’amorcer la saison avec lui et de maximiser sa valeur en vue de la date limite des transactions, ce ne serait pas pour en faire un défenseur de profondeur. On le ferait jouer, et c’est un Xhekaj ou un Harris qui écoperait.

Selon nous, deux types d’équipes seraient susceptibles de s’intéresser à Edmundson. Il y a celles qui, dès maintenant, pourraient juger qu’elles ont besoin d’un défenseur comme lui pour s’assurer qu’elles ont la profondeur et l’expérience nécessaires pour atteindre les séries l’an prochain. On pense entre autres aux Sabres, aux Capitals de Washington et aux Blues de St-Louis, qui n’ont jamais vraiment remplacé Edmundson après son départ de St-Louis en 2019.

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Une autre catégorie d’équipes pourrait émerger quand certaines formations de qualité auront été éliminées des séries après s’être fait brasser et qu’elles en seront venues à la conclusion qu’ajouter ce genre de défenseur est un morceau qui manque à leur casse-tête.

Il nous apparaît désormais improbable qu’Edmundson puisse générer à lui seul un retour qui s’approche d’un choix de première ronde, tel que cela avait été évoqué dans les mois précédant la date limite de cette saison. Il y a l’incertitude au plan de la santé, et aussi le fait que le grand arrière de 29 ans n’a pas offert son rendement habituel quand il a été assez en forme pour jouer.

Par contre, plusieurs choses peuvent être faites avec lui : le Canadien pourrait faire un échange de hockey avec une équipe qui a des besoins complémentaires; il pourrait accepter un moindre contrat en retour, question d’atténuer la facture refilée à l’autre équipe et ainsi obtenir un actif intéressant; et il pourrait choisir de retenir une partie de son salaire afin de le rendre encore plus attrayant.

À la dernière date limite des transactions, Hughes avait confié qu’il avait eu l’occasion d’agir comme tierce partie dans un échange afin de faciliter les mouvements de salaire, mais il avait jugé que de conserver la dernière des trois retenues de salaire auxquelles il a droit jusqu’au 1er juillet était plus important.

« Si une situation se présentait au repêchage, on ne pourrait plus le faire, a invoqué Hughes. Donc on a décidé, en fonction des retours possibles qu’on aurait pu avoir, que c’était préférable d’en conserver une. »

Les échanges impliquant de la retenue de salaire sont assez rares dans les jours et les semaines précédant le repêchage, mais il y en a quand même eu cinq depuis 2020, ce qui est probablement la conséquence d’un plafond salarial qui a cessé d’augmenter.

Les mauvais contrats

Il y a une autre forme d’échange qui nous apparaît prometteuse, celle d’ajouter Edmundson dans l’acquisition d’un mauvais contrat.

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Hughes a été très habile en allant chercher un choix de première ronde pour soulager les Flames de Calgary de la dernière année du contrat de Monahan lui rapportant 6,375 millions $ par année. Répéter le même stratagème cet été pourrait s’avérer difficile, mais étant donné que Hughes s’est dit ouvert à utiliser sa marge de manœuvre salariale de toutes les façons possibles pour s’améliorer, explorons certaines pistes.

Tyler Myers et Anthony Mantha sont deux hauts salariés que leur équipe respective n’aurait probablement pas objection à échanger afin de faire de la place sur leur masse salariale. Les Canucks de Vancouver et les Capitals de Washington ne sont pas intéressés à reconstruire, ils veulent se relancer dès la saison prochaine, et obtenir des liquidités additionnelles serait sûrement bienvenu.

Or, quand les Flames ont échangé Monahan au Canadien, ils étaient coincés sous le plafond et cherchaient désespérément une façon de se donner de l’oxygène. Les Canucks, et surtout les Caps, ne sont pas dans une situation aussi désespérée. En revanche, ces deux formations gagneraient toutes deux à ajouter un défenseur gaucher d’expérience comme Edmundson afin d’ajouter un peu d’étanchéité à la ligne bleue, quoique les Capitals – qui ont déjà quelques joueurs aux prises avec des maux de dos – sont méfiants par rapport à l’état de santé d’Edmundson. Le CH ne pourrait-il pas faire d’une pierre deux coups en offrant un joueur intéressant à ces deux équipes, obtenir une compensation pour les millions qu’il accepte d’absorber, et refiler Myers ou Mantha à une équipe de séries rendu à la date limite ?

Pour la dernière année de son contrat, Myers va empocher 5 des 6 millions $ qui lui sont dus grâce à un boni à la signature qui lui sera versé en septembre. C’est un incitatif pour les Canucks à s’en départir avant cela. À noter que le grand défenseur droitier possède une clause de non-échange de 10 équipes.

Mantha, lui, n’était pas dans les bonnes grâces de l’ancien entraîneur-chef des Capitals, Peter Laviolette, qui l’a retranché à quelques reprises. Il a été aux prises avec des blessures à l’aine et aux abdominaux et sa saison a été décevante. Mantha entre lui aussi en dernière année de contrat, avec un « cap hit » de 5,7 millions $ mais un salaire réel de 6,5 millions $ pour l’an prochain.

Autrement, on peut regarder du côté de l’ancien du Canadien Marco Scandella, qui est candidat à un rachat par les Blues. Scandella gagne 225 000$ de moins qu’Edmundson, mais les Blues trouveraient sûrement plus d’utilité à Edmundson. Ceux-ci détiennent trois choix de première ronde; est-ce qu’Edmundson et un atout supplémentaire les convaincrait de céder le moins bons de ces trois premiers choix en même temps que Scandella?

Le sympathique Scandella, qui a été hypothéqué par les blessures, serait un vétéran intéressant pour le Rocket de Laval l’an prochain.

Alex Newhook (Ron Chenoy/USA Today)

Un autre échange à la Kirby Dach ?

L’an dernier, le jour même du repêchage, Hughes a mis la main sur Kirby Dach après avoir échangé Alexander Romanov aux Islanders en retour du 13e choix au total. Les conditions étaient un peu particulières parce que les Blackhawks de Chicago étaient prêts à tout liquider et ils avaient un peu démissionné sur le potentiel du grand centre de 21 ans.

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La première saison de Dach à Montréal leur a donné tort.

Hughes et Jeff Gorton ont plusieurs fois mentionné que ce serait le genre de transaction qu’ils aimeraient recréer et, s’il n’est pas utilisé pour mettre la main sur Dubois, le choix de premier tour des Panthers semble l’atout tout indiqué pour y parvenir.

Le problème, c’est que les candidats à la Kirby Dach ne courent pas les rues.

S’il fallait définir les critères correspondant à ce type d’échange, on dirait que le Canadien mettrait la main sur un jeune joueur de 21-23 ans qui doit signer cet été son deuxième contrat, un jeune dont le rendement dans la LNH a un peu déçu l’équipe qui l’a repêché mais que le CH croit capable de faire éclore.

Ce serait farfelu d’envisager Alexis Lafrenière. Il n’a peut-être pas répondu encore aux attentes d’un premier choix universel, mais les Rangers ont amplement le temps de l’amener à maturité. Si ça se trouve, des performances moins dominantes rendront son deuxième contrat juste plus abordable. Jamais les Rangers s’en départiraient pour si peu.

Les deux seuls joueurs qui pourraient valoir un tel risque avec un 17e choix au repêchage seraient Alex Newhook, de l’Avalanche du Colorado, et Ty Dellandrea, des Stars.

Après trois saisons dans la LNH, Newhook n’a pas encore fait les pas nécessaires pour prouver qu’il peut être davantage qu’un centre de troisième trio, tandis que Dellandrea vient de disputer sa première saison complète dans la LNH à 22 ans et n’a pas eu le même impact que la recrue de 19 ans Wyatt Johnston.

Dans les deux cas, toutefois, on anticipe que leurs services seront surtout utiles plus tard. Si l’Avalanche perd cet été les centres J.T. Compher et Lars Eller, par exemple, Newhook serait sûrement candidat pour s’imposer dans le top-9. Quant à Dellandrea, qui a davantage été utilisé comme ailier droit jusqu’à maintenant, il risque d’avoir de meilleures opportunités si le contrat des Evgenii Dadonov, Max Domi et Luke Glendening n’est pas renouvelé.

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Mais si le Canadien faisait miroiter le 17e choix au total à l’Avalanche ou aux Stars, se laisseraient-ils tenter ? Dallas pas de choix de première ronde cette année tandis que le Colorado, bien qu’il en ait un, n’a ni choix de deuxième, de troisième et de quatrième ronde par la suite.

Hormis ces deux joueurs, les autres jeunes dont le premier contrat professionnel arrive à terme et qui pourraient bénéficier d’un nouveau départ ne valent pas un tel investissement. On présume que des atouts de moindre valeur permettraient d’aller chercher des joueurs du genre Rasmus Kupari ou Nils Höglander.

En élargissant la réflexion au-delà des jeunes joueurs qui écoulent leur premier contrat, on notera que Maxime Comtois et Jesse Puljujarvi risquent de coûter trois fois rien s’ils ne reçoivent pas d’offre qualificative de la part des Ducks d’Anaheim et des Hurricanes de la Caroline, respectivement. L’essai de Gurianov en fin de saison – un joueur dans une situation similaire – n’a pas été concluant, mais qui sait si une saison de Comtois avec le Tricolore ne lui permettrait pas de se relancer.

L’été dernier, le nouvel état-major du Canadien a démontré que le sabordage n’était pas l’unique façon de rajeunir et d’améliorer la formation. Kent Hughes a fait preuve de créativité dans une foule de gestes qu’il a posés. Et qu’il s’agisse de Dach, de Matheson ou même de Johnathan Kovacevic, réclamé au ballottage vers la fin du camp d’entraînement, il a su capitaliser sur des joueurs qui étaient jusqu’à un certain point sous-évalués dans l’organisation pour laquelle ils jouaient. On parle beaucoup de la nécessité pour les dirigeants d’identifier les inefficiences du marché à travers la LNH, et avec raison. Mais le talent d’une organisation est aussi d’identifier les inefficiences à l’intérieur même des équipe. C’est de cette façon que Hughes s’est le plus distingué à son premier été comme DG du Canadien.

S’il y a désormais une volonté d’avancer, de quitter la cave du classement et d’aspirer à se rapprocher des séries plutôt qu’à un autre choix top-5, il sera encore plus important pour Hughes de répéter le même genre de magie qu’il a réussie l’an dernier. Car dans son état actuel, le Canadien est encore bien loin du compte.

(Photo principale: Minas Panagiotakis/Getty Images)

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