Le message transmis par Martin St-Louis sera une clé du succès futur du Canadien

MONTREAL, CANADA - MARCH 09:  Head coach of the Montreal Canadiens Martin St. Louis handles bench duties during the third period against the New York Rangers at Centre Bell on March 9, 2023 in Montreal, Quebec, Canada.  The New York Rangers defeated the Montreal Canadiens 4-3 in a shootout.  Photo by Minas Panagiotakis/Getty Images)
By Marc Antoine Godin
Apr 14, 2023

Jusqu’à la toute fin, Martin St-Louis se sera assuré d’envoyer le bon message à ses joueurs.

Le résultat du 82e et dernier match de la saison du Canadien mettait en péril ses chances de repêcher parmi les cinq premiers au prochain repêchage, et une improbable victoire face aux Bruins de Boston allait faire passer ses chances d’avoir un choix top-5 de 41,8% à 15,4%. Dans la loge de l’état-major, une défaite était souhaitable.

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Mais sans surprise, les enjeux liés au repêchage n’étaient d’aucun intérêt pour l’entraîneur-chef du Canadien.

« On joue pour gagner, a insisté St-Louis après la défaite de 5-4 de son équipe. Si tu fais les choses de la bonne façon, de bonnes choses vont t’arriver. »

Le Canadien a tout donné, il a pris les devants dans le match trois fois face aux Bruins, et cet affrontement suintait la prolongation quand St-Louis a retiré le gardien Samuel Montembeault en fin de match.

Finalement, tout le monde a été content : les Bruins sont repartis avec une victoire de plus à leur saison record, le Canadien a sécurisé le 28e rang du classement général en perdant en temps règlementaire, et le coach avait toutes les raisons d’être fier de la façon dont ses hommes s’étaient battus.

« En tant qu’entraîneur, tu dois convaincre ton personnel, tes joueurs, de la manière dont tu vas faire certaines choses », a rappelé St-Louis dans un point de presse qui s’est vite transformé en bilan de fin de saison.

« S’ils ne sont pas convaincus, c’est probable qu’ils n’adhèrent pas et qu’ils ne travaillent pas aussi fort. Je pense que c’ est très encourageant qu’on obtienne ce genre d’effort. Ça me fait penser qu’ils sont convaincus et qu’ils adhèrent. Sans adhésion, c’est très difficile d’atteindre de grands objectifs. »

St-Louis n’a pas eu le luxe cette année de s’accrocher aux résultats pour se rassurer que les choses allaient dans la direction désirée. Mais sentir que ses troupes sont convaincues, même rendu au dernier match de la saison, même face au plus gros rouleau compresseur de la LNH, le rassure à l’effet qu’il est sur la bonne piste.

À plusieurs reprises au cours de la saison, St-Louis a cité les Bruins en exemple comme étant un modèle de constance, comme une équipe dont la culture est si bien implantée que peu importe qui se greffe à l’équipe, les nouveaux venus comprendront parfaitement ce qui est attendu d’eux. Il les a déjà comparés à un arbre aux racines profondes.

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C’est bien sûr à cela qu’il aspire à Montréal, mais St-Louis sait qu’il est encore loin du but. Il n’y a pas eu de constance dans l’alignement à cause des nombreuses blessures, il n’y a pas eu de constance dans les résultats, et l’arbre du Canadien vient à peine d’être planté.

Considérons son homologue Jim Montgomery, qui a d’excellentes chances d’être nommé entraîneur-chef de l’année dans la LNH après que ses Bruins eurent battu le record de 60 victoires du Canadien établi en 1976-77 en allant récolter pas moins de 65 victoires.

Les entraîneurs d’équipes dominantes sont rarement retenus pour le trophée Jack-Adams, car les votants préfèrent saluer le travail d’un coach qui a dépassé les attentes en faisant plus avec moins. Or, afin de permettre la saison historique que connaissent les Bruins, Montgomery a changé le ton que les joueurs étaient habitués d’entendre et a réussi à soutirer le meilleur d’eux.

« J’ai juste essayé d’être moi-même, a expliqué Montgomery jeudi matin. Les gars étaient prêts pour un feedback positif. Il a fallu que je me répète à moi-même que je devais leur soupirer des choses positives à l’oreille quand ils étaient au banc. »

« Il a changé des petites choses au niveau du système, mais c’est surtout au niveau de son approche, de la communication avec les joueurs, de sa connexion avec les joueurs, autant individuellement que collectivement, qui fait une énorme différence cette saison », a ajouté le capitaine des Bruins, Patrice Bergeron.

C’est intéressant de mettre cela en parallèle avec St-Louis, car maintenir une approche positive dans une saison de 31 victoires et dans une saison où l’équipe a raté plus de 700 joueurs-matchs en raison de blessures est beaucoup plus difficile que lorsque votre équipe ne perd jamais et qu’elle invite aux comparaisons avec un club qui alignait Lafleur, Shutt, Lemaire, Robinson, Savard, Lapointe et Dryden.

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À sa première saison complète en tant qu’entraîneur-chef dans la Ligue nationale, St-Louis a été testé dans son effort de maintenir une approche positive. Il ne voulait pas faire de cachettes à ses joueurs, il souhaitait toujours leur dire la vérité, mais il a compris qu’il devait également s’abstenir d’agir ou de parler sous le coup de l’émotion, et laisser la nuit remplir sa réserve d’enthousiasme.

« C’est facile de se perdre dans l’enthousiasme quand tu es émotionnel, alors c’est d’essayer d’être rationnel, a-t-il expliqué. Sur le moment, si l’on vient de perdre un match, est-ce que je suis enthousiaste? Pas autant que je vais l’être le lendemain. À ce moment-là, il y a des émotions qui rentrent. Quand tu es capable de laisser les émotions aller, tu peux apporter de l’enthousiasme dans ce qui va aider le lendemain. Tu peux être fâché et apporter des émotions négatives le lendemain, et c’est dur d’avancer avec des émotions négatives. »

L’enthousiasme est un ingrédient incontournable, et malgré les aléas de la saison, St-Louis a su conserver le sien. Et de la manière dont les joueurs se sont démenés au dernier match de la saison, il semble bien qu’ils y soient parvenus aussi.

Mais cela ne tombe pas des nues. Ce n’est pas le fruit du hasard.

En matinée, nous avons demandé à Montgomery ce qu’il considérait comme le plus gros défi d’un entraîneur-chef dans la LNH.

« Je pense que le plus gros défi c’est d’aller chercher les bonnes personnes pour être vos meneurs, a-t-il répondu. Moi, j’ai de très bon leaders et mon travail est vraiment facile. »

Il est bien évident que le leadership du Canadien n’est pas au niveau de celui des Bruins. Ni en quantité, ni en ancienneté. Mais rappelez-vous la saison dernière, rappelez-vous comment l’ancien entraîneur Dominique Ducharme déplorait le vide de leadership, ayant perdu Shea Weber et Corey Perry, sans compter Carey Price qui n’était pas là en raison d’une blessure.

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Ducharme parlait d’un leadership en transition, de joueurs qui devaient assumer des rôles et prendre un espace auquel ils n’étaient pas habitués.

Un peu plus d’un an plus tard, le CH a misé sur le bon cheval en nommant Nick Suzuki capitaine. Non seulement est-il le seul joueur du Canadien à avoir joué 82 matchs, et non seulement ses 26 buts lui ont finalement permis de rejoindre Cole Caufield au sommet des buteurs de l’équipe, mais Suzuki a surtout gardé son sang-froid au milieu d’une année rocambolesque, en ne laissant pas son jeu être trop affecté, et en étant une bonne courroie de transmission entre l’entraîneur et les joueurs.

Cette saison ne pourra que le faire grandir.

Le Canadien a Suzuki et quelques vétérans pour transmettre ce leadership, mais d’autres devront continuer de mûrir sans que l’entraîneur ne tire sur la fleur pour la forcer à pousser. Ça aussi ça va prendre du temps.

Dans l’intervalle, sa façon d’être l’a assuré d’avoir suffisamment d’alliés dans le vestiaire, suffisamment de missionnaires prêts à propager la bonne nouvelle.

Malgré les 39 joueurs qui ont porté l’uniforme tricolore cette année, St-Louis sent qu’il tient un filon.

« Le groupe croit en notre façon de vouloir faire les choses – je pense que ça s’est vérifié toute la saison avec la rotation des joueurs qui étaient dans l’équipe – et je pense que ça se répercute sur l’année suivante. On ignore à quoi va ressemblera notre formation, mais je sais qu’il y aura beaucoup de gars qui vont pouvoir aider à vendre ce qu’on essaie de faire ici. Mais ça prend du temps. »

Les Bruins sont un modèle à suivre, mais chaque organisation a sa propre façon d’établir sa puissance. Le niveau d’excellence que les Bruins ont atteint, par exemple, n’a absolument aucun lien avec un quelconque sabordage.

Mais le Canadien ne cherchera pas à imiter Boston, ni Toronto, ni la Caroline. Il va tracer sa propre voie avec les cartes qu’il a en main.

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« La comparaison est un voleur de joie », a fait valoir St-Louis à deux reprises au mois de février.

Mais avant de quitter pour l’été, se comparer le temps d’un match aux meilleurs de la LNH, et les tenir en haleine durant la majorité du match, a quand même dû donner satisfaction au Canadien. Dans son exécution, dans sa volonté, dans son enthousiasme, il y avait quelque chose qui ressemblait à la capacité d’être compétitif.

« Je pense que cette année, on en était au stade initial de ce qu’on veut faire, et l’année prochaine, on va juste être plus avancés, a indiqué St-Louis. À quelle vitesse est-ce qu’on va y parvenir ? Je ne sais pas. Mais pour moi, c’est de savoir quand est-ce qu’on va passer du temps que ça va nous prendre à jusqu’où on est capable d’aller ?

« Je ne sais pas quand ça va se produire, mais j’attends ce jour-là avec impatience. »

(Photo: Minas Panagiotakis/Getty Images)

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